Depuis longtemps, j’avais envie de participer à un Vipassana, il s’agit d’une retraite de méditation bouddhiste pendant laquelle on médite en silence 8 heures par jour, pendant 10 jours, assis par terre. Cela dit, avec mon caractère et ma tendance à vouloir bouger en permanence, c’était quelque chose qui me faisait très peur. Du coup, je cherchais une alternative : une façon de me donner du temps à passer avec moi-même et avec mes pensées, et de prendre enfin du recul après une année 2023 assez agitée (lancement de ma nouvelle entreprise, déménagement dans plusieurs pays différents, etc.).
L’année dernière, lors de mon passage sur Koh Phangan (lire ici l’article sur la retraite de Tantra), j’ai découvert l’existence d’un concept très intéressant : Inner Walk. Créée par un moine bouddhiste, c’est une retraite active : on marche 4 heures par jour pendant 4 jours, en faisant des allers-retours.
Cette année, j’avais un peu plus de temps à consacrer à mon développement spirituel et j’ai donc décidé de me lancer dans l’aventure. Puisque ça a changé pas mal de choses pour moi, je voulais vous faire part de mes retours et peut-être inspirer certains à prendre plus de temps pour eux aussi.
C’est quoi le concept de la méditation Inner Walk ?
Inner Walk est une pratique de méditation par la marche visant à comprendre et à libérer la souffrance causée par les confusions, illusions et projections mentales.
Elle se déroule sur 4 jours, avec 4 heures de marche silencieuse quotidienne, permettant de se connecter à soi-même et d’apprendre à être pleinement présent. Cette expérience se distingue d’autres pratiques méditatives par son approche de confrontation directe avec le bruit mental, offrant des outils pour la guérison personnelle et le renforcement intérieur.
Elle est ouverte à tous, sans nécessité d’expérience préalable, et se déroule dans un temple dédié sur l’île de Koh Phangan, en Thaïlande.
La retraite de méditation Inner Walk, ça se passe comment ?
La logistique est très simple. La retraite a lieu toutes les semaines du lundi au jeudi. Chaque jour, on se donne rendez-vous à midi, dans un espace ouvert et dédié. Il y a une facilitation d’environ une demi-heure (un peu plus le premier jour), où l’organisateur ou l’organisatrice donne des pistes de réflexion pour la séance qui arrive. Ensuite, il est l’heure de marcher. Le hall ou la marche prend place fait 25 m de large. On débute en faisant tous face au même côté, on marche tranquillement la tête baissée en regardant le sol à 3 m devant nous, et quand on arrive à l’autre bout, on fait demi-tour et on repart. Aucune autre distraction, rien d’autre à faire, rien d’autre à voir.
Chaque semaine, un groupe commence ensemble – dans mon groupe, nous étions 13 – mais chaque jour, d’anciens marcheurs viennent se joindre au nouveau groupe, et marchent soit pendant toute la durée des 4h soit pendant une heure ou deux. Il n’y a pas l’heure et on n’a aucune notion du temps. On essaie de se repérer en fonction du ciel, du soleil, des ombres, mais on ne peut pas dire qu’on a une idée précise de quelle heure il est.
Pendant les 4 jours où j’ai participé, les thèmes étaient les suivants :
Jour 1 : l’observation de ce qui se passe quand on se retourne pendant la marche – ça peut sembler banal, mais c’était assez intéressant de voir à quel point le cerveau se remet à zéro, en termes de pensée, à chaque fois que l’on fait demi-tour. Comme un nouveau départ.
Jour 2 : la piste de réflexion donnée est celle des émotions. Il s’agissait de regarder et d’observer nos émotions sans les juger, de voir ce qui surgissait et ce qui essayait de se cacher.
Jour 3 : Le thème était “relâcher le contrôle, se rendre”. Il s’agissait de faire preuve de lâcher-prise, d’arrêter d’essayer de tout contrôler – de simplement être, au lieu de faire.
Jour 4 : Le dernier jour, le thème était la compassion envers soi. La tendresse qu’on devrait s’apporter à soi-même, comme la gentillesse qu’on éprouve et qu’on démontre à nos amis, à nos proches, ou à notre famille.
Les pauses sont autorisées, bien que non recommandées. on peut aller aux toilettes, on
peut manger un snack, on peut s’asseoir ou se reposer, on peut pleurer si on en a besoin. ce n’est pas une pratique stricte, il n’y a pas vraiment de règles. certaines personnes passent plus de temps assises que debout.
c’est une pratique personnelle, et chacun va à son rythme.
Les pauses sont autorisées, bien que non recommandées. On peut aller aux toilettes, manger un snack, s’asseoir ou se reposer, pleurer si on en a besoin. Ce n’est pas une pratique stricte, il n’y a pas vraiment de règles. Certaines personnes passent plus de temps assises que debout. C’est une pratique personnelle, et chacun va à son rythme.
À la fin de chaque “séance”, le gong retentit, et on peut aller se reposer en cercle, écouter une chanson choisie par l’organisatrice, et partager ses ressentis avec le groupe – avant de chacun rentrer chez soi entre 5h30 et 6h. Évidemment, aucune obligation – si on n’a rien ressenti, si on ne veut pas partager, on peut rester silencieux ou juste s’allonger et fermer les yeux.
La retraite de méditation Inner Walk, qu’est-ce que j’en ai pensé ?
Pour être honnête, je ne pensais pas avoir une expérience aussi profonde avec ces quatre jours. Je n’avais pas vraiment peur du côté physique, puisque je suis très active, mais j’avais peur de passer du temps avec moi-même, je crois.
Et au final, j’ai réalisé pas mal de choses :
La douleur est inévitable, souffrir est optionnel. C’est peut-être une des leçons les plus importantes que j’ai apprises pendant ces 4 jours. Marcher sur du bitume sans s’arrêter pendant des heures, ça fait un mal fou aux pieds, au dos, au bassin. Ça fait mal à la tête aussi, parce qu’il fait chaud. Mais la réponse qu’on y apporte est de notre choix : on peut choisir de se concentrer uniquement sur la douleur, et louper pas mal du côté spirituel de l’exercice. On peut aussi se dire qu’il n’y a rien à y faire pour le moment et que si on ne peut rien faire contre quelque chose, autant l’accepter tel qu’il est. En détachant mon attention de la douleur, j’ai réalisé qu’elle disparaissait petit à petit. Évidemment, le massage des pieds qui a suivi était incroyable, mais en attendant, j’ai beaucoup moins souffert que je le pensais.
Il est possible de faire la paix avec soi-même. J’ai eu 16h pour y réfléchir, faire le point sur des souvenirs, sur mes envies, sur mes peurs. J’ai découvert que je pouvais tout à fait me pardonner, ce que je pensais impossible. Au cours des 32 dernières années, j’ai traversé des bonnes et des mauvaises périodes, et je m’en voulais pour pas mal de choses. Avoir revécu tous ces souvenirs m’a permis de faire la paix avec le passé et d’avoir une meilleure idée d’où je vais maintenant, qui je veux être.
Je suis exactement là où je suis censée être. Ces huit dernières années ont été une série de montagnes russes : j’ai beaucoup voyagé, changé d’endroit, changé d’amis, changé d’avis, changé de métier. Il y avait des tas d’autres options, et j’aurais pu être dans l’état d’autres endroits avec des tas d’autres gens. Mais ça va que je suis ici maintenant, sur mon île préférée en Thaïlande, entourée de gens que j’aime et qui m’aiment, qui me comprennent et qui m’acceptent exactement pour ce que je suis. Il est difficile de décrire la gratitude que j’ai ressentie à ce moment-là. J’ai une vie qui sort de l’ordinaire et qui est difficile à expliquer – J’ai des doutes que beaucoup d’autres gens n’ont pas à appréhender – Mais j’ai réussi à construire une vie qui me va exactement et qui me rend vraiment heureuse.
Pouvoir passer du temps avec soi-même est une chance – même quand on a mal aux pieds, au dos, et qu’on a hâte que ça s’arrête. C’est un luxe que beaucoup de gens n’ont pas, et je chérirai toujours ce souvenir.
Est-ce que je recommande de participer à la retraite de méditation Inner Walk ?
C’est une décision très personnelle, et elle doit être prise en pleine connaissance de cause. Pour ma part, je ne peux que recommander de venir et tester. Ce n’est pas pour tout le monde, et il y a certaines personnes qui abandonnent après un jour ou deux, mais dans l’ensemble, c’est une formidable occasion d’apprendre à se connaître un peu plus, de faire la paix avec soi-même et d’avancer (littéralement et figurativement).
Je compte retourner marcher plusieurs fois avant de repartir de l’île – juste histoire de me donner du temps, dans une vie qui laisse peu de place à l’introspection.